
Les Vosges 2011
Sentier des Crêtes des Vosges par le GR 5

Sentier des Crêtes des Vosges 2011
Randonner sur la crête du Parc Naturel Régional des
Ballons des Vosges, c'est traverser une région de contrastes à travers
d'immenses forêts mixtes et les chaumes brûlés par le soleil ; effectuer
des dénivelés important de dépressions en dépressions ; côtoyer de
nombreux vestiges de la « Grande Guerre » le long de cette ancienne
frontière jalonnée de bornes portant la marque F-D. ; loger et se
restaurer dans des gîtes ou refuges conviviaux.
C'est en suivant le GR5 balisé de rectangles rouges (pourquoi pas en blanc et
rouge) et avec le topo guide Crête des Vosges ainsi que les cartes ad hoc que
nous avons réalisé cette randonnée de Ribeauvillé à Thann début septembre 2011.
1 étape : Ribeauvillé - Aubure Km 12 D+ 680 D- 145
Arrivés à Ribeauvillé vers midi, nous décidons de chausser
nos godasses et d'entamer notre rando sur le champ pour sortir de l'animation
qui règne dans la ville des ménétriers que nous visiterons à notre retour. Un
kilomètre d'asphalte comme échauffement. Nous jouissons d'une belle vue sur les
ruines des trois châteaux qui dominent la vallée du Stregbach. Le GR 5 est
rejoint à hauteur de la rue Saint-Morand pour partir à l'assaut de la forêt. Le
sentier est bordé de châtaigniers. Au hasard d'une trouée apparaissent les
châteaux de Ribeauvillé. La montée nous amène au col du Seelacker à l'altitude
676. Par un large chemin forestier qui
flirte avec les courbes de niveau, nous passons au carrefour du « Sapin
des Français ». Encore quelques mètres d'horizontal, puis un sentier qui à
l'approche du sommet zigzague entre les rocs nous hisse au Koenigsstuhl (940)
« siège royal », rocher, avec un évidement à la forme d'un siège sculpté par l'érosion. Le sentier de crête
se fraie un passage parmi les rochers pour atteindre le sommet au Rocher du Tétras. Imposant bloc rocheux de grès et de
poudingue. C'est une pente douce parmi les hauts pins, dans un premier temps,
puis la forêt s'assombrit dans une plantation d'immenses sapins qui, par
enchantement, s'ouvre sur le plateau et Aubure, village de montagne le plus
haut d'Alsace. Il nous reste à rejoindre le gîte d'étape les Brimbelles
« myrtilles » tenu par des Tournaisiens expatriés.
2 étape : Aubure -Etang du Devin Km 18 D+ 1030 D- 700
Huit heures quarante-cinq sonnent à l'église Saint Jacques
le Majeur lorsque nous quittons Aubure pour monter au col de Fréland. Halte au
belvédère et magnifique point de vue sur les crêtes vosgiennes. Ce monument fut
construit lors de la
Première Guerre mondiale par les soldats allemands cantonnés
à Aubure. L'asphalte est bientôt abandonné pour monter le chemin militaire,
panorama sur la vallée de Fréland. Parmi les résineux odorants, on atteint
l'abri du Club Vosgien à la
Pierre des Trois Bans. Altitude 1100 mètres à la
frontière des bans d'Aubure, Fréland et Sainte-Marie-aux-Mines. Le GR5 et le
GR532 se marient pour parcourir la crête jusqu'au pied du Petit Brézouard où le
GR532 descend sur Le Bonhomme. Un raidillon, et le Petit Brézouard avec son
sommet dégagé nous offre une superbe vue sur un paysage dégagé, au loin avalé
par un voile atmosphérique. Une courte descente et de nouveau un raidillon
parmi les résineux pour monter au Grand Brézouard nettement plus boisé. Le jeu
de montagne russe continue. Descente par un étroit sentier pour aussitôt
remonter et enfin partir à l'horizontal. La descente vers le col des Bagenelles
est amorcée dans une forêt où des stères
de bois de chauffage débitées s'entassent proprement, comme tirées au cordeau.
Du col, c'est par la traversée d'une prairie que nous plongeons sur le village
Le Bonhomme en coupant les lacets de la route. Petite halte pour se désaltérer
et c'est reparti pour une grimpée. En se retournant, on mesure bien le chemin
parcouru car le Grand Brézouard est bien visible. Au sommet, nous rejoignons un
chemin forestier quasi horizontal. Le gîte d'étape L'Etang du Devin est à un jet de pierre d'un ancien cimetière de
soldats allemands de la guerre 14/18 (les corps ont été transférés au cimetière
allemand de Hohrod).
Six heures. Le soleil rougeoie le ciel sur la Plaine d'Alsace. En prenant
notre petit-déjeuner le temps vire au gris. Bientôt les gouttes de pluie
forment des petites marres sur les tables de la terrasse. Les sacs allégés des
vêtements de pluie, nous repassons devant l'ancien cimetière allemand pour
descendre à l'Etang du Devin. Situé à 926 mètres d'altitude,
cet ancien étang est devenu une tourbière couverte d'une végétation de type
alpestre. Le sentier part à droite pour partir à l'assaut de la Tête des Faux à travers une
forêt de hêtres et de sapins. D'importants vestiges de la guerre 14/18
jalonnent la montée. Au détour d'un lacet, apparait, menaçante,
l'impressionnante masse de béton de la gare d'arrivée du funiculaire qui
montait de Lapoutroie. Elle était reliée aux ouvrages du sommet de la Tête des Faux par un tunnel
en tranchée de 1100
mètres pour ravitailler en munitions et matériels les
ouvrages du sommet. De la Roche
du Corbeau où subsistent des ruines d'ouvrages militaires, la vue doit être
belle, mais le paysage est noyé dans une mer grise de bruine. Un court
raidillon et nous sortons de la forêt. A travers la bruyère et un amas de
roche, on atteint le sommet de la
Tête des Faux (1208
m) où se dresse une croix. Aux alentours, les restes de
casemates, des chevaux de frises qui protègent des vestiges de tranchées, des
poutrelles et des barbelés rouillés sont envahis par la végétation. Les gouttes
d'eau glissent sur les feuilles, instant d'émotion sur ce sommet théâtre de
combat sanglant lors de la « Grande Guerre ».
Les sacs s'alourdissent des vêtements de pluie. Une dévalée et nous randonnons sur le sentier
muletier qui servait à ravitailler l'armée française. Au carrefour de plusieurs
chemins, le cimetière Duchesme, à l'ombre de grands sapins, est un témoin
émouvant dans cet endroit de calme et de paix. Ici reposent quatre cent huit
soldats français dont cent seize sont regroupés dans un ossuaire. Le cimetière,
tout comme le sommet de la Tête
des Faux, est classé monument historique depuis 1921.
Nous contournons la Tête des Immerlins par un large chemin forestier
qui nous emmène au col du Calvaire. Quelques foulées en descente et bientôt le
sentier monte à travers une hêtraie avec quelques timides apparitions du Lac
Blanc qui se cache au pied du versent abrupte. Au sommet le paysage change
radicalement. Nous quittons la forêt pour pénétrer dans la Réserve Naturelle
du Tanet-Gazon du Faing donc l'altitude varie entre 1160 et 1306 mètres. Vaste
étendue silencieuse de chaume jaune et ocre en pente douce vers l'ouest et
falaise abrupte à l'est. De-ci de-là quelques îlots de conifères et de sorbiers
aux baies d'un rouge vif apportent une discrète touche de couleur. Le sentier
de crête, entre l'Alsace et la
Lorraine, longe la falaise. Parcours de montagne russe, de
dépressions en dépressions, dans un paysage « fagnard ». Au lieu-dit
Taubenklangfelsen à l'altitude 1296 mètres, le petit lac du Forlet aux reflets
d'argent en contrebas et les collines d'Alsace plantées de sombres forêts de
sapins offrent aux randonneurs un paysage contrasté.
Un large sentier délimité par des piquets en bois nous
pilote à travers le Gazon de Faîte pour fouler quelques instants la Route des Crêtes et retrouver
la forêt. Montée, descente, le lot de cette journée continue. Une rude montée
nous hisse à un amoncellement de roches à la Roche Tanet. Quelques
vestiges de casemates et vallonnements à perte de vue. Vers le sud, le Hohneck
est bien visible. Les pentes s'adoucissent. Au Spitzenfels, parmi de vieux
hêtres, le sentier parsemé de roches plonge littéralement vers le col de la Schlucht.
Dans un flot incessant de voitures et de motos nous
prenons le temps de nous désaltérer avant de retrouver le calme de la forêt de
feuillus pour rejoindre le refuge CAF
Après notre conversation de la veille avec le
gardien du refuge, notre décision est prise : nous rejoindrons le Hohneck
par le Sentier des Roches (GR531). Le soleil se lève à gauche du Petit Hohneck,
le ciel est comme un immense brasier.
Il nous faut donc retraverser la prairie au-dessus
du refuge pour redescendre au col de La Schlucht et là, à l'orée du bois, dans les hautes
herbes, un chamois se nourrit et se laisse observer un long moment avant de
rejoindre le couvert de la forêt en quelques bonds.
A cette heure matinale, il n'y a pas âme qui vive au
col. Quelques mètres sur l'asphalte, une volée de marches et le Sentier des
Roches à flan de montagne nous accueillent. Aménagé au début du 20ème
siècle, le sentier, une pente douce à travers la forêt, n'a rien
d'impressionnant en son début. Une centaine de mètres plus loin, changement de
décor. A droite, la falaise nous surplombe, à gauche le précipice. Montée et
descente, gauche droite, passage sécurisé par des mains courantes, passerelles
surplombant une faille, marches métalliques ou taillées dans la roche se
succèdent. Ici l'eau glisse sur la roche, là les racines affleurent, polies par
le passage des randonneurs. La prudence est de mise dans cet environnement
minéral, mais vaut le détour. Nous y avons croisé trois randonneurs. Au
lieu-dit Krappenfels, le sentier s'assagit et par une pente toute en douceur
rejoint un large chemin forestier que nous remontons pour atteindre l'ancien
cirque glaciaire du Frankenthal. Les clarines de vaches vosgiennes résonnent
dans cette demi-lune au pied des pentes du Hohneck et les parois verticales des
rochers de la
Martinswand.
Un dénivelé d'une bonne centaine de mètres nous
hisse au Schaeferthal entre le Petit Hohneck et le Hohneck. Nous quittons la
forêt pour les sommets couverts d'herbe rase. De nouveau un dénivelé d'une
bonne centaine de mètres le long du versant alsacien. Vue imprenable sur le lac
Schiessrotried.
Parmi de nombreux randonneurs en tong, nous gagnons
le Hohneck, troisième sommet des Vosges. Altitude 1362 mètres. Vue
panoramique sous un soleil généreux. Par le GR5, deux kilomètres nous séparent
du refuge des Trois Fours bien visible vers le nord. Sept kilomètres par le
Sentier des Roches, mais cela en valait la peine. Pique-nique, et nous quittons
cet endroit accessible en voiture par la Route des Crêtes. Le GR5 est abandonné pour partir avec la variante des crêtes. La
traversée des chaumes du Kastelberg nous offre une palette de couleurs
indéfinissables. Quelques grimpées et dévalées à travers chaumes brûlées et
forêts, et le col du Herrenberg, but de cette journée, est atteint.Quatre cent mètres nous séparent du gîte du Ski Club
de Mulhouse, logement uniquement, ou hors sac. Dans la salle à manger trône un
« kachelhofe », poêle de masse alsacien en carreaux de faïence
verte.
Nous avons pris soins de réserver une table à la
ferme auberge Huss pour le repas du soir. C'est un repas marcaire (salade, tourte, purée de
pommes de terre, collet de porc fumée et dessert) copieux et excellent
qui nous est servi dans une salle comble et typique où l'on peut admirer une
belle collection de clarines. Pour conclure cette journée, nous rejoignons le
gîte accompagné de quelques gouttes de
pluie.
5 étape : Gîte Ski Club de Mulhouse-Grand Ballon Km 17 D+ 660 D- 465
Non ce n'était pas un rêve, il a plu une bonne
partie de la nuit.
Les nuages au niveau du sol nous entourent. La
vallée naissante de la Thur
a disparu, avalée par la brume. Nous distinguons à peine le chemin pour nous
rendre à la ferme auberge Huss où nous prenons le petit-déjeuner et notre
pique-nique. Nous remontons au col du Herrenberg pour nous enfoncer dans le
brouillard de plus en plus dense. Du chaume traversé, nous ne verrons que la
pointe de nos chaussures. Dans la forêt qui nous emmène au col d'Hahnenbrunnen,
les arbres aux branches tordues, chargées d'humidité, s'égouttent. A partir du
col, le brouillard par endroit devient plus lumineux, se disperse. Par moment
le monde réapparaît.
A Markstein, centre touristique, un timide rayon de
soleil nous accueille. Le sentier remonte à travers les chaumes, pratiquement
parallèle à la route des crêtes. Nous pique-niquons à hauteur du chaume
Hundskopf, bientôt entourés de vaches vosgiennes qui vont partir à la suite
d'un groupe de randonneurs. La vue sur la vallée de la Thur est superbe avec
Saint-Amarin sous les nuages accrochés dans les hauts sapins.
Dans la forêt Storken la pluie crépite dans les
feuillages. Au hasard d'une percée, entouré par de nombreux nuages, le Grand
Ballon joue à cache-cache. Nous faisons halte à la ferme auberge au col du Haag
(rien à voir avec la ferme auberge Huss) où nous somme dévisagés par les
nombreux consommateurs endimanchés. Aurions-nous l'air de martiens ?
La pluie et les nuages bas sont bien présents pour
monter au Grand Ballon qui culmine à 1424 mètres. Trois
chamois détalent. Au sommet, la nébulosité est telle que l'imposant monument
des Diables Bleus est à peine visible. De la rotonde du centre radar pour
l'aviation civile, la table d'orientation ne nous est d'aucun recours. Tout
azimut, que du gris, visibilité nulle et un vent qui hurle dans la structure
métallique. Il ne nous reste qu'à descendre au chalet hôtel du Grand Ballon et
mettre à sécher nos vêtements.
Six heures trente. La lutte entre nuages et
éclaircies est toujours d'actualité. Pendant le petit- déjeuner les embellies
semblent prendre le dessus. Nous remontons au sommet du Grand Ballon dans
l'espoir de profiter du paysage. Espoir déçus. Au fil de la montée, les nuages
dans une course folle, poussés par un vent violent, nous enveloppent. Il est frustrant de ne
pouvoir apercevoir le panorama circulaire, d'où par temps clair, la plaine
d'Alsace, la Forêt Noire,
les Alpes bernoises et françaises se laissent admirer.
Récupérations des sacs. La longue descente vers
Thann débute par la traversée d'une prairie jusqu'à la ferme auberge du Grand
Ballon. La route des Crêtes est traversée deux fois avant de pénétrer dans la
forêt de feuillus. Passage à la chapelle du Sudel dédiée à Jeanne d'Arc en
hommage aux combattants tombés dans le secteur durant la Première Guerre
Mondiale. Entre le col Amic et les ruines du petit château fort Freundtein, sur
notre droite le Grand Ballon nous nargue, bien visible sous un ciel bleu où
flotte quelques nuages.
Un sentier quasi horizontal à travers une forêt de
feuillus nous semble interminable. Les moteurs rugissants des tronçonneuses
résonnent dans cette immense forêt vosgienne. Le long du sentier, quelques
énormes sapins au fût élancé, marqués à la couleur rouge, sont en sursis.
Au col de Silberloch le cimetière éponyme installé sur un terrain
pentu comprend 1264 tombes de soldats qui ont pu être identifiés et six
ossuaires. La crypte, au centre de laquelle se trouve un ossuaire, abrite les
restes de 12000 soldats inconnus. En travaux lors de notre passage nous n'avons
pas pu la visiter.
Retour sur le GR5. Arrivé à la ferme auberge du
Molkenrain où nous pensions nous restaurer, personne. Même le chien est absent,
la niche est vide. Pourtant l'écriteau sur la porte indique bien « ouvert
d'avril à novembre ». Pour une fois que nous n'avons pas prévu de
pique-nique ! Heureusement, de l'autre coté du sommet, le chalet des Amis
de la Nature
est ouvert. Nous nous contenterons d'une soupe minute et graterons les fonds
des sacs. Deux bonnes heures de descente à travers bois avec de belles vues sur
la vallée de la Thur
pour joindre les ruines du château fort de l'Engelsbourg datant du 13ème
siècle. Un curieux cylindre renversé, reste du donjon, dont une section se
renversa, lors de sa destruction ordonnée par Louis XIV. La vue est splendide
sur la ville de Thann avec sa collégiale Saint-Thiébaut de style gothique
rhénan couverte de tuiles vernissées polychromes. La flèche d'une hauteur de
plus de 78 mètres,
dentelle de pierres qui semble libérée de son poids, s'élance vers un ciel de
plus en plus menaçant. Il nous reste à descendre le vallon de Kattenbach
pour faire notre entrée à Thann sous une averse et nous rendre au Cercle Saint
Thiébaut où nous passerons la nuit.
Nous avons tout le loisir de visiter la collégiale.
Imposant édifice. Minutieusement ciselé dans un souci de perfection par les
sculpteurs, le grand portail est splendide avec ces trois tympans qui, grâce à
cent cinquante scènes, rappellent la vie de la Vierge, la Nativité et la Crucifixion. A
l'intérieur, les boiseries sculptées et les vitraux répartis sur huit verrières
de quinze mètres de haut sont saisissants de détails. Moment de paix dans ce
lieu de quiétude. Quelques instants je pense à ceux qui sont tombés pour un
tracé imaginaire que l'on appelle... frontière.
Train et bus nous ramèneront à Ribeauvillé le lendemain.
Nos logements :Les Brimbelles : 68150 Aubure tel 03.89.73.91.04
L'Etang du Devin : 68650 Lapoutroie tel 03.89.47.20.29 dudevin1@calixo.net
Refuge des Trois Fours : 68140 Stosswihr tel 03.89.77.32.59 caf-troisfours@ffcam.fr
Refuge Hus Ski Club de Mulhouse : andre.hanss@estvideo.fr
Chalet Hôtel du Grand Ballon : 68760 Willer sur Thur tel 03.89.48.77.99: hotelgrandballon@wanadoo.fr
Cercle St Tiébaut : 68800 Thann tel 03.89.37.59.60